Le mois de Novembre 2017 commence un peu chaud. Dans un communiqué commun signé par douze personnes  de la coalition des forces vives, sociales et politique de la Province du Sud-Kivu, notamment la Lucha, la NDSCi, l’UNC, l’UDPS et le Rassemblement et plusieurs autres partis de l’opposition et des mouvements citoyens, elles appellent les habitants à observer une journée ville morte ce Mercredi 1 novembre 2017 et de ne pas aller dans les marchés, de bouder les écoles, de ne pas ouvrir les banques, les universités, de fermer les boutiques et magasins en restant à la maison.

Ceci dans l’objectif de réclamer la tenue immédiate des élections conformément à  l’accord de la Saint Sylvestre.

« On ne libère jamais un peuple, mais un peuple  se libère, seule la lutte libère » Tel est le message fort qu’on peut lire dans leur déclaration.

Lorsque les forces de l’AFDL pénètrent dans Kinshasa, le 17 mai 1997, la « démocratisation version Mobutu » a, au cours d’une « interminable » transition aux contours mal définis, engendré plus de quatre cents (400 !) partis politiques. La quasi-totalité d’entre-eux n’ont ni véritable programme de gouvernement, ni projet de société, ni option idéologique claire. Pour ceux qui prétendent en avoir, il s’agit en réalité d’un chapelet de vœux pieux, une sorte d’attrape-tout destiné avant tout à « accrocher » les naïfs.

En 2011 – soit quatorze ans plus tard, quatorze ans ponctués d’une horrible guerre qui a failli faire disparaître notre pays de la carte – la situation est qualitativement la même : toujours une multitude de partis politiques sans vision, sans projet sérieux et sans spécificité nette au plan idéologique.

Historiquement, les partis politiques de par le monde sont nés pour porter chacun une idéologie bien définie. Le libéralisme, le socialisme, le capitalisme, le communisme, la social-démocratie, le socialisme chrétien, l’écologisme, le nationalisme, le fascisme … ont été créés pour jouer ce rôle. Certains sont arrivés à prendre seuls le pouvoir et à l’exercer durablement. D’autres ont été obligés de former des coalitions pour participer à l’exercice du pouvoir. D’autres encore ne sont jamais arrivés aux commandes mais ont réussi à influencer de l’extérieur les différents régimes qui se sont succédés dans le pays.

Aujourd’hui, il est question d’organiser l’espace politique congolais de manière à faire disparaître la médiocrité et la complaisance qui y ont élu domicile. Comment s’y prendre ? Dans ce monde d’après-guerre froide, tous les Etats démocratiques sont pour ainsi dire gouvernés au Centre. Mais, comme l’alternance au pouvoir est la vertu cardinale en démocratie, on se retrouve en face de deux grandes familles politiques qui alternent aux commandes de l’Etat : le Centre-droit et le Centre-gauche.

Ainsi, aux Etats-Unis d’Amérique, le Parti Républicain est du Centre-droit tandis que le Parti Démocrate est du Centre-gauche. En France, c’est la coalition UMP-Nouveau Centre qui est du Centre-droit et la coalition PS-PC-Verts, du Centre-gauche. En Grande Bretagne, c’est le Parti Conservateur qui (avec ou sans le Parti Libéral) est du Centre-droit tandis que le Parti Travailliste est du Centre-gauche ; en Allemagne, c’est, en gros, la CDU (au Centre-droit) et le SPD (au Centre-gauche). La même situation s’observe en Italie, en Belgique, en Espagne, en Autriche, au Portugal, au Canada, au Japon, en Inde, etc.

Et en Afrique ? Rien de tel ! Sans doute estimons-nous, là encore, avoir des « spécificités » à faire valoir ? La vérité est que, même ici, nous ne devons pas chercher à « réinventer la roue » ! Comme partout ailleurs, notre espace politique doit être cerné en fonction des idéologies en présence à ce jour dans les Etats qui se veulent démocratiques. Seuls ceux des partis politiques qui, par rapport aux idéologies connues, auraient de réelles spécificités à faire valoir viendraient s’ajouter sur cette liste – à notre avis – nécessairement courte. L’indispensable financement par l’Etat du fonctionnement des partis politiques – non à l’arrivée mais à la naissance de ces derniers – ne peut devenir en effet possible que s’ils sont tout au plus une dizaine et non … plusieurs centaines !

Avec la démocratie participative, l’exercice deviendra plus aisé parce que ce sont les citoyens eux-mêmes qui exigeront cette clarification idéologique préalable avant d’adhérer à tel ou tel parti.

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Après une guerre particulièrement meurtrière et destructrice, nous avons obtenu en 2002, au prix de douloureux renoncements et de lourds sacrifices, un début de paix et de réunification du pays. Il fallait, nous semble-t-il, imaginer,  dès cet instant, des mécanismes appropriés pour ne pas rater la réconciliation nationale.

Car, en effet, la réconciliation nationale dont il était question à cette époque se situait à au moins trois niveaux, à savoir : primo entre les belligérants ; secundo, entre ceux-ci et le reste de la classe politique ; tertio, enfin, entre la classe politique et le peuple. Si, malgré quelques difficultés de parcours, la réconciliation au sommet (c’est-à-dire entre dirigeants et/ou belligérants d’hier et d’aujourd’hui) semble avoir été réalisée (probablement, sur le dos du peuple !), on ne peut en dire autant en ce qui concerne le sommet et la base, les gouvernants et les gouvernés.

Or, c’est cette réconciliation-là (entre le sommet et la base) qui est d’une importance capitale pour nous parce qu’il s’agirait enfin là d’une réconciliation en profondeur, une réconciliation qui reposerait désormais sur un nouveau type de rapports entre un patron (qui s’ignorait) qu’est le peuple et un serviteur (devenu patron par la force des choses !) qu’est le gouvernant.

Un tel basculement du rapport des forces ne serait possible, à nos yeux, que si, le peuple arrivait à placer, à chaque échelon de gouvernance, les meilleurs de ses fils et filles pour le servir. La recherche permanente de l’excellence dans la gouvernance globale conduirait nécessairement à cet indispensable partage des rôles prôné par le célèbre futurologue Alvin TOFFLER dans « Les nouveaux pouvoirs »  (Fayard, Paris, 1991).

D’après cet auteur en effet, le travail citoyen au niveau d’un pays devrait désormais être réparti entre trois catégories de gouvernés : les « Localistes » (ou ceux qui, compte tenu de leur conscience politique du moment, ne pourraient donner le meilleur de leur citoyenneté qu’au niveau local), les « Provincialistes » (ou ceux qui ne peuvent être performants que jusqu’au niveau de la Province ou de l’Etat fédéré) et les  « Nationalistes » (ou ceux dont la bonne prestation est garantie jusqu’au niveau national). Il va même jusqu’à prévoir la place des « Continentalistes » et des « Mondialistes ».

Si nous voulons construire un Etat à part entière sur les cendres du Quasi-Etat actuel, si nous voulons bâtir une vraie démocratie participative en lieu et place de la ‘’ vraie-fausse ’’ démocratisation en cours, si nous voulons empêcher la reproduction de l’oligarchie compradore née sous MOBUTU et poser ainsi les bases d’une véritable République Démocratique au cœur de l’Afrique … bref, si nous voulons supprimer la cause des coups d’Etat, des rébellions, des sécessions, des guerres civiles…, nous devons radicalement changer notre conception du pouvoir d’Etat en prenant désormais comme fondement la participation effective du citoyen – pris individuellement – à l’exercice du pouvoir 

Notre ambition est donc de  mobiliser à la base toutes les énergies qui partagent avec nous cette vision des choses. Nous sommes en effet convaincus que seule une forte mobilisation, à la base, des élites encore … « saines » peut secréter dans la durée un leadership réellement soucieux d’entreprendre les profondes réformes qui s’imposent afin que, de la base au sommet de l’Etat, une véritable démocratie de développement

  • Cette démocratie qui placerait enfin l’accent sur le citoyen en tant qu’individu, en tant qu’acteur autonome et, de ce fait, agent de son propre développements’installe au cœur de l’Afrique avant de gagner le reste du continent.

 En somme, d’après nous, la démocratie participative est le fruit d’un véritable management non pas, comme c’est le cas jusqu’ici, à l’échelle d’une Entreprise, d’un service public ou d’une organisation particulière mais plutôt et pour la première fois, à l’échelle de tout un pays, une Nation, un Etat. En d’autres termes, le management des Citoyens est la porte qui ouvre sur la démocratie participative.

L’Afrique se meurt par la faute de ses dirigeants !

Koffi Annan : Ex Secrétaire Général de l’ONU

Or, comme dit l’adage :

Chaque peuple a les dirigeants qu’il mérite !

  • Au regard de la situation d’un pays comme le nôtre, cet adage semble se vérifier surtout après lecture du poème ci-dessous sur l’analphabétisme politique !

  » Le pire des analphabètes c’est l’analphabète politique.

Il n’écoute pas, ne parle pas, ne participe pas aux événements politiques.

Il ne sait pas que le coût de la vie, le prix de haricots et du poisson, le prix de la farine, le loyer, le prix des souliers et des médicaments Dépendent des décisions politiques.

L’analphabète politique est si bête qu’il s’enorgueillit et gonfle la poitrine pour dire qu’il déteste la politique.

Il ne sait pas, l’imbécile, que c’est son ignorance politique qui produit la prostituée, l’enfant de la rue, le voleur et le pire de tous les bandits :

Le politicien malhonnête, menteur et corrompu, qui lèche les pieds des entreprises nationales et multinationales. »

Berthold BRECHT Poète Allemand

Aujourd’hui, l’Etat peine à assumer ses responsabilités, l’aménagement du Territoire se fait au petit bonheur, par l’usage cavalier des notions de base de la Décentralisation, des normes de création des entités territoriales décentralisées.
Et le comble, c’est que l’autisme, l’aveuglement politique, la gabegie financière se sont confortablement installés dans le chef du leadership conduisant à l’inanité toute initiative de développement.

En visite de recherche au Kivu au cours de l’année 2009, une radio locale interrogeait les auditeurs sur la signification de la visite d’une très haute autorité du pays dans cette partie du territoire. « Que cette autorité vienne ici ou pas, cela ne change rien dans ma vie. On y est habitué. C’est pour sa femme et ses enfants qu’elle travaille.

Donc sa venue me laisse totalement indifférent ! « Cette réponse que j’écoutais me laissa ébahi et interpellé. Il en est de même des propos que je pus glaner au niveau de la société civile sur l’assemblée provinciale et le gouvernement provincial dans leur quête pour l’amélioration des conditions de vie de leurs constituants.

Les contours de cette conférence peuvent se résumer autour de la problématique ci après : que faut – il faire après les élections ? Un vote à l’assemblée provinciale constitue-t-il un gage certain et un instrument réel de légitimation de l’exercice du pouvoir ?
Quelle passerelle ou rapports doit on établir entre performance politique (gagner et maintenir le pouvoir, assurer la représentation des gagnants et maintenir les solidarités et assises) et performance économique (avec ses impératifs administratifs de sélection selon le mérite, de jugement sur les questions d’opportunité, de vision économique, de planification et
de dynamisme à infuser dans les groupes ?). Le leadership politique est-il compatible avec le leadership économique, social et traditionnel et comment les paliers partenaires de la société civile peuvent ou doivent-ils cohabiter au Sud-Kivu ? Bref, pourquoi tant d’instabilité politique au niveau provincial ? Les peuples peuvent ils être gouvernés contre leur gré et doit-on les imposer des leaders ? Selon certaines recherches, il est plus facile de gagner les élections que de gérer l’après élection, de diviser que de rassembler et de transformer le leadership politique en leadership économique. Par ailleurs, le leadership intellectuel manque souvent de pragmatisme et de stratégie pour utiliser son savoir, en vue soit de conseiller correctement les rois et de servir honnêtement le peuple, les deux sans se prostituer, ou de capitaliser toujours sur leur savoir pour assumer un rôle économique et social perceptible. Il est difficile de se muer en Tarzan sans cerveau, sans muscles et sans expérience issue de la vie dans la jungle.